« Cerise », le cheval percheron en bronze, nous accueille à la sortie n°4 de l'autoroute A11. Juste derrière, une zone d'activité d'une dimension étonnante pour la petite – et rurale – commune de Luigny, dans l'Eure-et-Loir…
Luigny. Un peu moins de 400 habitants au dernier recensement, soit seulement 22 habitants au kilomètre carré. Pourtant Luigny crève un plafond en zone rurale: avec 34 entreprises sur son sol, c'est même un véritable record qu'elle détient dans la catégorie. « Nous sommes bien placés, entre Chartres et Le Mans, et l'échangeur n° 4 de l'autoroute permet d'accéder rapidement aux grandes villes alentour », explique Michel Ricoul, garagiste, habitant de la commune et conseiller municipal depuis 2007, maire depuis 2008.
Le profil des entreprises est multiple. On y trouve de l'artisanat, de l'industrie, de la plasturgie avec Dorier Plast, des additifs et des produits d'entretien pour l'automobile avec Soditen (Metal 5), de la chimie avec CMS High-Tech (recyclage de solvants), des services avec Archiv System (archivage physique et électronique), et maintenant un silo à pois dont la construction vient de s'achever sur les hauteurs de la commune. A la clé, des recettes fiscales intéressantes. Mais aussi des difficultés.
Fédérer les volontés, telle est la question…
« Le développement économique se traduit souvent par des luttes entre municipalités, enchaîne Michel Ricoul. On pourrait faire davantage encore, Luigny pourrait même jouer un rôle de plaque tournante à l'échelle du territoire. J'ai essayé de fédérer les intercommunalités mais elles changent avec le temps, et il est difficile d'inscrire une stratégie dans la durée. » A l'image de ce projet de zone commerciale qui n'a jamais vu le jour, faute de réunir les autres communes autour de l'initiative.
Autre difficulté: si les recettes fiscales sont élevées, elles sont reversées au Parc d'activités du Perche eurélien (PAPE), structure administrative caduque mais qui n'est pas encore dissoute, alors que ses compétences devraient désormais relever de la communauté de communes. « C'est une spécificité, insiste Michel Ricoul. Nous attendons que les services de l'Etat tranchent officiellement. » Et d'ajouter, avec une pointe de regret: « J'ai de bons rapports avec les entreprises, mais force est de reconnaître que la mairie n'a qu'un pouvoir extrêmement limité auprès d'elles. ». Qui plus est, la zone d'activité des Marchais, victime de son succès, est aujourd'hui saturée.
Cela étant, Luigny n'attire pas que des entreprises. Dans le lotissement nouvellement créé au nord de la commune, la moitié des lots sont d'ores et déjà vendus sur un total de vingt-cinq. « Preuve de l'attrait de Luigny et de sa situation géographique privilégiée, les demandes de permis de construire sont nombreuses. Il y a un mouvement, qu'il faut considérer comme un préalable à toute action. Car avant de parler de commerces, il faut déjà amener de la population. Or la nôtre est vieillissante, les écoles ferment. C'est la tendance, hélas, en milieu rural. » A l'évidence l'autoroute est un avantage majeur pour Luigny, un potentiel qu'il lui faut impérativement exploiter: « Nous sommes sur l'ancienne route d'Orléans à Saint-Malo, c'est un axe très fréquenté », rappelle le maire, qui sait tout l'intérêt des infrastructures en matière de développement…
Texte et photo: Philippe François